Capucin et prêtre


A l’occasion de l’année sacerdotale, Guy Albert Néris a demandé à deux frères capucins prêtres de témoigner sur la façon dont ils envisageaient leur ministère. Dominique Sauvenier et Henri Singer ont répondu à la question suivante :

"En tant que frère prêtre mineur capucin, comment vis-tu ce ministère dans l’Église et dans l’ordre ? Quelles sont tes joies et tes peines et en quoi la fraternité est-elle porteuse dans ton ministère ?

...parmi les plus jeunes

Au début de ma réponse, je voudrais rappeler ce qu’un ancien ministre provincial de Québec avait écrit sur l’ordination presbytérale dans notre ordre :"L’ordination presbytérale dans l’Ordre des Frères Mineurs Capucins doit être un ensuite au service d’un d’abord".

Oui je me dois d’abord de toujours rechercher à honorer ma vocation de frère mineur capucin. Personnellement je pense que notre état de vie est d’être religieux et religieux capucin, et que le fait d’être prêtre est un service que je rends à l’Église et à l’Ordre.

Dès lors j’aurais préféré le sens suivant des mots de la question : en tant que frère mineur capucin, prêtre...

PNG Ceci dit, je n’ai pas non plus à renier le fait que je sois prêtre.

Voilà maintenant long-temps que je suis inséré dans la pastorale de la santé : depuis 1993, (plus de 15 ans). J’y ai été présent en tant que frère en formation (5 ans), après , en tant que frère profès solennel (3ans) et ensuite comme prêtre (8ans).

Dans ce ministère, que ce soit en tant que prêtre ou non, nous vivons bien sûr des peines car nous sommes confrontés, au quotidien, à un milieu de souffrance.

Mais ce milieu de souffrance n’est pas uniquement source de peine, il est également source de joie. Lorsque nous pouvons accompagner un souffrant en témoins de Jésus Christ. Mais également accompagner certains membres du personnel soignant.

Je viens d’arriver il y a deux mois à la fraternité de Strasbourg et les années les plus nombreuses de ma vie de frère capucin prêtre, c’est à la fraternité de Blois que je les ai vécues.

Je voudrais remercier un frère âgé, et il n’y a pas de honte à le nommer, il s’agit du frère Pierre Levallois, qui, presque tous les jours m’a toujours attendu pour me poser la question :"Comment cela a été à l’hôpital ?" Je voudrais également remercier les jeunes frères tamouls, qui n’ont jamais dit non lorsqu’il s’agissait de me remplacer dans le cas des appels en urgence. Je peux dire qu’il y a eu un véritable témoignage de vie fraternelle sur l’hôpital de Blois

Et ce témoignage s’est encore plus concrétisé lorsque ma succession fut assurée par le frère Joseph Prabu Simon. Ce fut une réelle joie pour moi.

En tant que prêtre, je vis une certaine frustration, peiné de ne pas voir la relève dans nos assemblées.
Et en tant que frère prêtre, je désirerais que les instances de notre Église comprennent mieux notre charisme religieux, sans vouloir par manque de prêtre essayer de nous récupérer dans la mise en place de la structure de l’Église diocésaine.

Nous sommes d’Église, mais nous devons apporter notre pierre spécifique à la construction de l’édifice.

Mais en arrivant en Alsace, je peux remarquer qu’il y a encore beaucoup de groupes de jeunes chrétiens : mouvements de jeunesse, aumôneries, groupe de Taizé...

P.S. : je suis conscient du langage parlé employé. J’aurais pu également développer un peu plus. Mais d’autres doivent s’exprimer.

frère Dominique Sauvenier

...parmi les anciens

Capucin et prêtre : deux aspects, deux éléments de ma vocation et de ma mission ; dans ma vie ils ont été une histoire progressive. Histoire faite de tensions, d’ajustements réciproques pour tendre vers l’unité.

La première formation (école Saint-Fidèle, études philosophiques et théologiques) avait comme but : former des prêtres. Mais l’exercice du ministère sacerdotal a montré ses limites, surtout dans le contexte de la déchristianisation. En même temps a eu lieu une redécouverte de la vie religieuse franciscaine. D’où alors la question :vie et ministère sacerdotaux ou témoignage de la vie évangélique franciscaine. Pour moi ma vie s’est unifiée à partir de la vie religieuse.

La joie fondamentale, c’est d’avoir unifié les deux aspects de ma vie et de ma mission tout en donnant nettement la priorité à ma vie religieuse et franciscaine et son témoignage au milieu de gens simples et pauvres. Cela n’a pas empêché des joies qui relevaient de mon ministère de prêtre : joies ponctuelles quand à l’occasion des sacrements ou de la prédication, des personnes m’ont manifesté que cela les avait aidées dans leur vie de foi, dans leur vie chrétienne... Joie peut être plus fondamentale de constater que les pratiques spécifiques du ministère et du témoignage de la vie franciscaine ont le même but, la même orientation fondamentale : la Bonne Nouvelle de Dieu révélée en Jésus le Christ et actualisée par son Esprit pour le bonheur et le salut des hommes. Les difficultés proviennent sans doute du petit nombre de personnes qui font appel, qui recourent au ministère sacerdotal. Je pense souvent à la parole du Christ :"Ne crains pas, petit troupeau, car il a plu au Père de vous donner le royaume". Joies et difficultés alternent dans notre ministère sacerdotal, comme dans la vie du Christ, dans la vie des apôtres et dans la vie et le ministère de tous les prêtres.

PNG Pour moi, il y a d’abord la fécondité des sacrements dans ma vie personnelle ; dans la mesure où j’essaie de les vivre en esprit et en vérité (sacrements de la réconciliation et de l’eucharistie) je suis probablement plus à même d’aider des chrétiens à les vivre comme une rencontre avec Dieu à la suite du Christ et dans son Esprit. La prière est centrale ; c’est la source nécessaire et indispensable. C’est le moment et le lieu de la rencontre avec Dieu à la suite du Christ, dans son Esprit. C’est là que se creuse la "synergie" dont tout le ministère sacerdotal tire sa fécondité, sa persévérance, son renouvellement...

La vie fraternelle avec la vie en commun (vie de prière, vie d’aide matérielle, de services réciproques) est une mise en œuvre de la vie évangélique ; elle ne peut donc que m’aider dans mon ministère sacerdotal : leur orientation vaut toujours dans le même sens ; Dieu le Père, Jésus le Christ, l’Esprit Saint...

Permettez une remarque plus générale :l’histoire des relations réciproques entre le ministère sacerdotal et vie religieuse franciscaine et capucine, avec ses recherches et ses péripéties est sans doute très personnelle dans la vie de chaque frère.

frère Henri Singer