L’Ordre Franciscain séculier, souvent appelé en France Fraternité franciscaine séculière rassemble les laïcs, les prêtres et les diacres qui, en Fraternités, s’engagent à vivre l’Évangile à la manière de saint François.
Le lundi 15 novembre le pape François a reçu en audience les participants au récent Chapitre général de l’Ordre franciscain séculier, auxquels il a adressé les paroles suivantes :
Chers frères et sœurs de l’Ordre Franciscain Séculier, bonjour !
Je vous salue par les mots que saint François a adressés à ceux qu’il a rencontrés en chemin : « Que le Seigneur te donne la paix ! ». Je suis heureux de vous accueillir à l’occasion de votre Chapitre général. Dans ce contexte, je voudrais rappeler quelques éléments propres à votre vocation et mission.
Votre vocation est née de l’appel universel à la sainteté. Le Catéchisme de l’Église catholique rappelle que « les laïcs participent au sacerdoce du Christ : toujours plus unis à Lui, ils manifestent la grâce du Baptême et de la Confirmation dans toutes les dimensions de leur vie personnelle, familiale, sociale et ecclésiale, et répondent à l’appel à la sainteté adressé à tous les baptisés ».
Cette sainteté, à laquelle vous êtes appelés comme Franciscains séculiers, comme vous le demandent les Constitutions générales et la Règle approuvées par saint Paul VI, implique la conversion du cœur, attiré, conquis et transformé par Celui qui est le seul Saint, qui est « le bien, tout bien, le bien suprême » [1]. C’est ce qui fait de vous de vrais « pénitents ». Saint François, dans sa Lettre à tous les fidèles, présente « faire pénitence » comme chemin de conversion, chemin de vie chrétienne, engagement à faire la volonté et les œuvres du Père céleste. Dans son Testament, il décrit son propre processus de conversion en ces termes que vous connaissez bien : « Le Seigneur me donna ainsi à moi, frère François, de commencer à faire pénitence ; comme j’étais dans les péchés, il me semblait extrêmement amer de voir des lépreux. Et le Seigneur lui-même me conduisit parmi eux et je fis miséricorde avec eux. Et m’en allant de chez eux, ce qui me semblait amer s’est changé pour moi en douceur de l’esprit et du corps. Et après cela, je ne restais que peu de temps et je sortis du siècle. » [2]
Le processus de conversion est celui-ci : Dieu prend l’initiative : « Le Seigneur me donna de commencer à faire pénitence ». Dieu conduit le pénitent là où il n’aurait jamais voulu aller : « Dieu me conduisit parmi eux, les lépreux ». Le pénitent répond en acceptant de se mettre au service des autres et en usant de miséricorde avec eux. Et le résultat est le bonheur : « Ce qui me semblait amer s’est changé pour moi en douceur de l’esprit et du corps ». Exactement le chemin de conversion emprunté par François.
C’est, chers frères et sœurs, ce que je vous exhorte à réaliser dans votre vie et dans votre mission. Et, s’il vous plaît, ne confondons pas « faire pénitence » avec « œuvres de pénitence ». Celles-ci - le jeûne, l’aumône, la mortification - sont les conséquences de la décision d’ouvrir son cœur à Dieu. Ouvrez votre cœur à Dieu ! Ouvrir son cœur au Christ, vivre au milieu des gens ordinaires, à la manière de saint François. De même que François était un « miroir du Christ », de même, puissiez-vous devenir vous aussi « des miroirs du Christ ».
Vous êtes des hommes et des femmes engagés à vivre le monde selon le charisme franciscain. Un charisme qui consiste essentiellement à observer le saint Évangile de notre Seigneur Jésus-Christ. La vocation du franciscain séculier est de vivre l’Évangile dans le monde à la manière du Poverello, sine glossa [3] ; prendre l’Évangile comme « forme et règle » de vie. Je vous exhorte à embrasser l’Évangile comme vous embrassez Jésus. Laissez l’Évangile, c’est-à-dire Jésus Lui-même, façonner votre vie. De cette façon, vous prendrez avant tout pour signe distinctif la pauvreté, la minorité et la simplicité.
Avec votre identité franciscaine et séculière, vous faites partie de l’Église « en sortie ». Votre lieu de prédilection est au milieu des gens, et là, comme laïcs - célibataires ou mariés -, prêtres et évêques, chacun selon sa vocation spécifique, pour témoigner de Jésus avec une vie simple, sans prétention, toujours contents de suivre le Christ pauvre et crucifié, comme l’ont fait saint François et tant d’hommes et de femmes de votre Ordre. Je vous encourage aussi à aller dans les périphéries, les périphéries existentielles d’aujourd’hui, et là pour faire résonner la parole de l’Évangile. N’oubliez pas les pauvres, qui sont la chair du Christ : vous êtes appelés à leur annoncer la Bonne Nouvelle (cf. Lc 4,18), comme l’a fait, entre autres, sainte Élisabeth de Hongrie, votre patronne. Et de même que les « fraternités de pénitents » d’autrefois se distinguaient en fondant des hôpitaux, des dispensaires, des soupes populaires et d’autres œuvres de véritable charité sociale, de même l’Esprit vous envoie aujourd’hui exercer la même charité avec la créativité qu’exigent les nouvelles formes de pauvreté.
Que votre laïcité soit pleine de proximité, de compassion et de tendresse. Et soyez des hommes et des femmes d’espérance, engagés à la vivre et aussi à l’« organiser », la traduire dans des situations réelles du quotidien, dans les relations humaines, dans l’engagement social et politique ; nourrir l’espoir de demain en soulageant la douleur d’aujourd’hui.
Et, chers frères et sœurs, vous êtes appelés à vivre cela en fraternité, conscients de faire partie de la grande famille franciscaine. À cet égard, je rappelle le désir de François que toute la famille reste unie, certainement dans le respect de la diversité et de l’autonomie de ses différentes composantes et aussi de chaque membre. Mais toujours dans une communion vitale réciproque [4],
pour rêver ensemble un monde dans lequel tous nous sommes et nous sentons que nous sommes des frères, et travailler ensemble à le construire (cf. Encyclique Fratelli tutti, 8) : des hommes et des femmes qui se battent pour la justice, et qui travaillent pour une écologie intégrale, en collaborant à des projets missionnaires et en se faisant artisans de paix et témoins des Béatitudes.
Nous sommes ainsi partis du chemin de la conversion, puis de toutes ces propositions de fécondité, qui viennent du cœur uni au Seigneur, et qui aime la pauvreté. Que saint François et tous les saints de la famille franciscaine vous accompagnent dans votre cheminement. Que le Seigneur vous bénisse et que Notre-Dame, « Vierge faite Église » [5], vous protège. Et s’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi. Merci.