Molex, la révolte du curé-ouvrier

La Dépêche du Midi, 7/10/2010


Nous reproduisons ci-dessous un article de la Dépêche du Midi parus le 7 novembre 2011 à propos de P. Bachet, ofmcap, curé de Villemur.

La révolte du curé-ouvrier

Tout un symbole : le modeste curé de la paroisse de Villemur-sur-Tarn contre les puissants actionnaires américains de Molex… Héritiers des prêtres ouvriers, le père Philippe Bachet est entré en résistance contre la disparition du sous-traitant automobile. Depuis deux ans maintenant il soutient « ses » Molex envers et contre tout, et organise aujourd’hui dimanche un office spécialement dédié aux salariés en souffrance. Ce matin, syndicalistes, paroissiens et simples curieux voisineront sur les prie-Dieu pour une grand-messe inédite. Surtout ne pas parler au père Bachet de mondialisation. Ce monstre qui « valorise l’exploitation » au détriment de « l’homme et son noble labeur ». « Au XXe siècle, on s’est battu pour que les ouvriers s’organisent contre l’exploitation, explique l’ecclésiastique. Aujourd’hui, le contexte est similaire. L’économie n’est plus basée sur le travail mais sur le profit, les échanges boursiers, la folie financière. Il faut trouver un juste équilibre entre le capital, le travail et l’investissement. Et que l’on rende enfin à l’homme le fruit de son travail. » Fort de cette doctrine - que « l’évêque rouge » Mgr Gaillot n’aurait pas reniée - le père Bachet organise donc un office aux côtés de l’association Solidarité Molex, la communauté chrétienne locale et l’Action catholique ouvrière. « Un office pour les Molex et les Brusson, corrige-t-il. Car grâce à un travail commun ces établissements sont sauvés, avec l’arrivée d’actionnaires espagnols. Il faut donc garder espoir pour les Molex, et toutes mes prières vont vers eux. » Dimanche, l’office débutera à 10 h 45. Des salariés viendront apporter leurs témoignages « de résistance et d’espérance ». Puis la messe prendra son cours normal, avec toutefois un slam « sur la crise » qui suivra l’incontournable « Notre père »… « On dit que je suis proche des partis de gauche, confesse le curé. Moi, je ne suis ni politique, ni syndicaliste ; mon combat est évangélique. Disons que j’assure un service social catholique. »

« Fidèle à notre cause »

Chez les ouvriers de Molex, qui comptent peu de grenouilles de bénitiers, on prend cette messe et ce « pasteur d’usine » très au sérieux. « Le père Bachet nous a toujours soutenus dans notre combat, précise Patrick Frégolent, président de Solidarité Molex. Il vient souvent voir les gars, interroge, réconforte. Il jouit donc d’une grande estime chez les salariés. Moi je ne suis pas fidèle mais le curé, lui, l’est à notre cause. Alors oui, nous irons dimanche à l’église. » A leurs manières tous prieront à l’unisson, pour que ce chemin de croix s’achève enfin.